Éditorial

Bienvenue dans notre nouveau numéro de Perspectives Protestantes, qui vous présente notamment les textes des deux conférences données à l’occasion de notre journée de travail du 21 avril 2018 sur le thème générique du changement. Mais entre le changement climatique qui menace notre environnement et nos modes de vie, voire notre survie, et le changement intérieur, dont la conversion est l’une des manifestations, quel rapport ? Les liens sont en fait multiples, car faire face à un changement climatique et environnemental aussi radical que celui qui s’annonce – et qui est déjà en cours – ne va pas sans de difficiles remises en question qui s’imposent à nous sur les plans philosophique, économique, politique et spirituel, et ce aussi bien collectivement qu’individuellement.

C’est tout d’abord l’objet de la conférence de Dominique Bourg, professeur à l’université de Lausanne et grande figure du combat écologique. Selon lui, nous sommes aujourd’hui dans une crise du monde moderne qui met en cause la perspective, jusque là admise, d’un progrès continu grâce à la puissance de la science. Dominique Bourg développe au contraire de nombreux exemples des impacts destructeurs du progrès. Il nous faut donc avant tout comprendre et intégrer la gravité de la situation et les urgences qu’elle entraîne, afin d’engager des actions à la hauteur des enjeux, qui abandonnent un rapport à la nature uniquement fondé sur la domination et la violence. Ce sont ces actions qui sont décrites dans les pages suivantes.

A côté de ce changement écologique, Sarah Stewart-Kroeker traite d’un autre changement, intérieur celui-là, sur le thème de la conversion, et notamment celle qu’Augustin d’Hippone décrit dans les Confessions. Pour Augustin, face à l’immuabilité de Dieu, le mouvement et le changement dans la temporalité sont le propre de l’homme. Ce changement est toujours d’une certaine manière un combat, en particulier quand il s’agit d’une lutte contre soi-même. Mais la raison n’y suffit pas, le choix est entravé par quelque chose qui échappe à la volonté. Il y faut la grâce qui se déploie selon un mouvement dans le temps, du passé au futur. D’où l’idée de pérégrination, de pèlerinage, qui va de l’exil de l’humain sur terre à Dieu, sur le chemin que nous montre le Christ au sein de son église qui est elle-même pèlerine. Mais qu’est-ce qui pousse l’humain à entreprendre ce voyage ? Vous le découvrirez dans les pages de Sarah Stewart-Kroeker.

Jean-Jacques de Rham, théologien et aumônier de l’EPG, nous propose une recension critique du livre de Jean-Philippe Fabre, Le disciple selon Jésus, le chemin vers Jérusalem dans l’évangile de Marc. C’est le thème de la suivance au Christ qui y est développé, suivance qui serait rendue possible par une « guérison », laquelle aboutirait à un changement d’identité pour devenir disciple.

Dans notre rubrique « état de la recherche », Sandrine Landeau, assistante et doctorante à la faculté de théologie de Genève, nous livre un résumé de ses travaux de thèse sur « herméneutique et épistémologie chez Jean-Claude », un pasteur français du 17 ème siècle. Elle y questionne notre mode de lecture de la Bible : y a-t-il une place pour la raison dans la foi ? Et pour le doute ? Lisons-nous la Bible à la lumière d’une rencontre personnelle avec Dieu, d’une tradition ecclésiale, des sciences historiques ? Là aussi, une réflexion approfondie peut nous amener à changer nos habitudes de lecture et d’interprétation de la Bible.

Bonne lecture !

Jean-Yves Rémond
Doctorant à la faculté de théologie de Genève